Construire des Hommes de chevaux… Suite et fin !

équipe jeunes Eric Louradour

Voilà maintenant presque deux mois que je collabore avec une nouvelle équipe de trois jeunes que je vous ai présenté lors de mon dernier article sur mon blog. Je suis très heureux d’observer leur grande et rapide évolution et de constater aussi leur réelle passion. 

Ces jeunes sont aujourd’hui une réelle source de motivation. Tout comme le bon enseignant doit rester toute sa vie un élève passionné qui continue à toujours chercher et s’informer pour mieux partager, l’élève lui doit prouver sa véritable capacité à observer, écouter, travailler en toute humilité, sérieusement et activement. Quand les deux acteurs s’apprécient sincèrement alors les progrès sont flagrants et en peu de temps !

C’est en ce sens que j’apporte actuellement une certaine pression vis-à-vis de leur travail afin de contrôler leur réel degré de passion mais aussi leur capacité à supporter, à encaisser et à se dépasser jusqu’à la fin de leur période d’essai, fixée au 31 décembre. Mieux vaut leur faire connaître les possibles situations inconfortables du métier de suite et qu’ensuite ils se sentent toujours plus à l’aise et soutenus, plutôt que l’inverse.

Je désire aussi savoir à qui je vais donner, si la personne le mérite, si elle entrera dans ma mentalité et adoptera ma philosophie équestre pour savoir ensuite la partager. C’est l’expérience d’une vie intense et difficile de recherche perpétuelle du meilleur que je désire léguer. Cela a un prix ! Je ne peux pas l’offrir sur un « plateau d’argent » sans que les personnes me montrent une grande éthique, passion, détermination et ambition. Ils doivent savoir qu’avec les chevaux, l’Homme peut s’oublier et nos amis équidés doivent rester notre priorité. Qu’ils veuillent devenir enseignants, grooms, dirigeants d’écuries, cavaliers professionnels mais surtout réussir dans tout ce qu’ils entreprendront, ils doivent savoir se dépasser et me le montrer. Ils doivent me prouver qu’ils sont prêts à donner pour recevoir.

Aujourd’hui j’ai le sentiment que c’est le cas ! Je les apprécie beaucoup et je pense qu’ils sont conscients de la chance qu’ils ont de travailler dans une écurie magnifique, adaptée au bien-être des chevaux permettant également d’en faire de véritables athlètes. Ils ont peu de chevaux à s’occuper et sont de grandes qualités et bien dressés ; des horaires agréables et des congés respectés ; un salaire qui tombe chaque mois à la même date ; un travail très structuré et exécuté dans d’excellentes conditions sur le plan pratique et fonctionnel ; enfin un instructeur expérimenté et généreux qui leur donne des cours réguliers…

Dans cet objectif, pas un jour ne passe sans qu’ils apprennent au moins une chose nouvelle. À tous moments nous échangeons. Si eux n’osent pas ou n’ont pas toujours le réflexe de me faire des demandes, je les questionne régulièrement afin de susciter leur intérêt et leur curiosité. L’autre jour par exemple, alors que nous marchions au pas sur la piste de galop, je leur pose cette question : Connaissez-vous la fameuse citation du Général l’Hotte : « Calme, en avant et droit » ? Mais surtout pouvez-vous me développer ce concept ? Leurs réponses étaient assez floues… Je leur rappelle alors que pour que ce soit bien clair dans leur tête mais aussi dans celle de n’importe quel auditeur, il faut utiliser des mots simples et précis, avec des images claires et parlantes. Tout cela doit être facile à retenir.

Je leur explique donc en mes termes que la priorité avec un cheval est d’obtenir le calme. Un cheval qui n’a pas confiance en l’homme peut se révéler difficile, imprévisible, ingérable, craintif, fuyant, déconnecté et dangereux. Il faut donc créer avec lui un rapport où il va être à notre écoute et exécuter sereinement et généreusement ce que nous lui demandons. Cela, sans pour autant, le contraindre ou le bloquer dans une certaine attitude et par la force, ni l’endormir… C’est seulement grâce à beaucoup d’attentions, du bien-être, des récompenses et un rapport juste et équilibré qu’on peut créer une réelle connexion avec l’animal pour le voir ainsi répondre rapidement et efficacement à nos demandes. Si ces dernières sont bien formulées, bien évidemment ! Au début nous devons nous comporter comme un géniteur qui tient son enfant par la main alors que ce dernier fait ses premiers pas. Nous devons le rassurer, l’inciter à ne pas courir mais à marcher lentement. Nous maintenons une présence en lui tenant la main mais sans pour autant tirer sur son bras. Nous le rassurons et l’invitons à nous faire confiance, à nous écouter… Avec les chevaux c’est exactement la même chose, le même rapport. 

Ensuite « en avant ». Pour aller de l’avant, un cheval ne doit pas courir ou se précipiter. Il doit seulement penser « en avant » et faire preuve d’impulsion. Cela veut dire qu’il doit accepter et répondre rapidement et efficacement aux actions de jambes du cavalier en maintenant de l’activité ou vitalité. En termes techniques on dit que le cheval reste devant les jambes de son cavalier. Un cheval qui n’accepte pas ou ne répond pas aisément aux actions de jambes du cavalier devient ennuyeux, fatiguant, pénible voire difficile à monter… S’il a en plus des réactions « vers l’arrière », il peut devenir dangereux (rétif, écarts et refus de se porter de l’avant, se cabrer, se retourner…). 

Pour finir, « droit ». Un cheval droit est un cheval qui maintient les antérieurs sur la même ligne que les postérieurs ou bien ses épaules devant les hanches ou bien encore la tête devant les épaules, et les épaules devant les hanches. La rectitude ne s’obtient que si un cheval est calme (disponible, connecté) et en avant (comme s’il avait une porte ouverte devant lui faisant preuve d’impulsion). La rectitude est indispensable pour obtenir du cheval une bonne propulsion symétrique et identique des deux postérieurs. Un cheval droit permet également d’obtenir de la fluidité dans les allures et les déplacements. 

Pour leur permettre de bien se remémorer cette devise du Général L’Hotte, je leur fait comprendre que celle-ci est aussi valable dans leur vie d’Homme et particulièrement s’ils prétendent à être reconnus un jour comme des Hommes de chevaux. S’ils se destinent à enseigner, ils devront sensibiliser leurs élèves sur ses atouts et qualités avant même de les mettre à cheval. Comment peut-on prétendre qu’une personne maîtrise un animal si elle ne sait déjà pas se maîtriser elle-même ? 

L’Homme doit donc être calme : celui qui sait perdre du temps va en gagner. Réagir calmement dans bien des situations porte souvent au bon raisonnement et à la bonne réaction. C’est un trait qui invite à l’écoute, à la sérénité, à la paix. 

L’homme doit aller de l’avant : qu’est-ce qu’une vie sans évolution ? Aller de l’avant à tout niveau est une source de motivation. C’est également une preuve d’intelligence et de désir de vivre sa vie pleinement plutôt que stupidement.

L’homme doit être droit : c’est une des plus belles qualités humaines. La preuve, on dit bien « Être droit dans ses bottes » ! Cela veut dire être toujours correct, entier, honnête, sincère… Savoir se comporter correctement en toutes situations incite au respect et même à l’admiration. 

Il ne me reste plus qu’à espérer que mes jeunes collaborateurs resteront sensibles à ces enseignements pour devenir de véritables Hommes de chevaux. Je leur souhaite un merveilleux parcours équestre et je profite de cet article pour leur souhaiter, ainsi qu’à vous chers amis lecteurs, de belles fêtes de fin d’année. Prenez bien soin de vous ! 

Sportivement vôtre, Éric

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