Silence dérangeant, discours embarrassant, acte bienveillant : comment aller de l’avant ?

Eric louradour

L’opposition, le débat, le dialogue, la confrontation respectueuse, la dénonciation justifiée, l’implication, la passion peuvent pousser aux changements, à la progression, à l’évolution. Ces dernier temps j’ai vécu, lu ou observé divers faits qui m’ont incité à réagir et à écrire ce post.

La semaine dernière, je lisais un article paru dans le plus important journal sportif français : L’Équipe. Cet article donnait la parole à un cavalier que j’admire pour sa détermination, son évolution et sa prise de conscience. Il s’agit de Gregory Cottard. Quand on est toujours actif au sein d’un système il faut du courage pour le critiquer. Grégory pourrait se mettre à dos des collègues cavaliers, des sélectionneurs ou décideurs… Il prend ce risque pour sensibiliser toutes et tous sur le bien-être animal et sur le fait de simplifier l’équitation. Je ne peux que partager certaines de ses préoccupations car depuis longtemps je m’insurge moi aussi contre un mode « trop archaïque ou rustique » de pratiquer l’équitation. Elever sa voix est doublement complexe, puisqu’il faut aussi faire attention à ne pas divulguer un message négatif laissant penser qu’il n’y a que des “tortionnaires” dans notre sport. Cela pousserait le néophyte, l’ignorant ou l’extrémiste et bien des associations de protection des animaux à critiquer tous cavaliers, à donner une mauvaise image de notre milieu et à s’appuyer sur ces témoignages pour chercher à faire interdire toutes activités équestres. Dans toutes choses, il faut essayer de trouver l’équilibre. On ne peut pas critiquer qui utilise une martingale, un mors à gourmette, une muserolle… Ce n’est pas l’ustensile qui est dérangeant, préoccupant ou irrespectueux, c’est la manière dont on l’utilise ! Et c’est là que les fédérations doivent intervenir et être garantes d’une transmission de la belle et juste équitation ainsi que du respect de l’animal et des traditions.

Le deuxième fait concerne mon implication il y a quelques mois dans le soutien d’un des candidats durant la campagne électorale pour la présidence de la Fédération Française d’équitation et, il y a déjà quelques années, ma démission de mon rôle d’entraîneur national en Italie et de tout le secteur jeunes (poney, enfants, juniors et jeunes cavaliers). Dans les deux cas, j’ai pris position dans l’intérêt commun ! Observant certains dysfonctionnements dans le système, la gestion et la vision de ces fédérations nationales, je me suis mis dans l’opposition et même retiré d’un rôle que pourtant j’adorais et dans lequel j’avais obtenu beaucoup de succès. J’ai préféré ainsi rester libre de mes paroles et de mes actes en continuant à faire « entendre ma voix ». J’affectionne la confrontation par le dialogue et l’implication si elles permettent une certaine sensibilisation ou évolution ! Dans les deux cas j’en ai pris plein la tête mais il faut l’accepter car quand on prend position automatiquement on sait qu’on va recevoir bien des coups. J’ai osé me mouiller même si cela m’a valu donc des critiques, des difficultés et fermé même des portes. Je ne me suis pas laissé intimider pour autant. Il faut toujours aller de l’avant en laissant parler sa conscience et son coeur.

Le troisième fait concerne un voyage en train de France en Suisse que j’ai fait il y a une dizaine de jours, pour aller essayer des chevaux. J’avais consulté et acheté mes billets en ligne sur le site de la SNCF. J’ai eu un premier désagrément quand le train côté français et pour un trajet de seulement trente minutes, eu vingt minutes de retard. À cause de cela, je perdis ma première correspondance en Suisse. Là-bas les trains sont vraiment ponctuels. De plus quelle ne fut pas ma stupeur quand lors d’un contrôle par une employée de la CFF, cette dernière me dit être surprise que la SNCF m’ait vendu un tel billet dont les trains et horaires ne sont plus valables et en vigueur depuis un an. Elle décide spontanément de prendre une photo de mon billet pour faire ainsi remonter l’information à sa direction et alerter la SNCF. J’ai trouvé sa réaction formidable, vraiment professionnelle, digne d’une personne respectueuse et engagée qui malgré son rôle au bas de l’échelle va « élever la voix » pour le bien-être de tous. Aussi bien dans son intérêt pour préserver son emploi mais aussi des clients et de sa compagnie… Voilà un geste responsable qui mérite le respect et l’admiration. C’est grâce à la bienveillance, à l’implication, au professionnalisme et au bon sens de personnes comme cette contrôleuse qu’un système fonctionne et que le monde va de l’avant vers l’excellence !

Morale de ces histoires : dans la vie il y a ceux qui observent et restent muets, ceux qui parlent peut-être trop vite sans analyser vraiment le poids de leurs mots ou de leurs actes et puis il y a ceux qui sont engagés, et qui désirent changer les pensées, les mœurs ou les modes par le dialogue, l’union et l’action appropriée et ce malgré des contre-parties parfois violentes qu’ils peuvent subir… Il est grand  temps pour tous les acteurs de notre filière cheval, du plus petit au plus grand, de réagir et de faire « entendre leur voix » pour le bien commun. Aujourd’hui grâce à internet il serait facile d’organiser des groupes de réflexions, des débats, des référendums… Nous devons tous nous unir pour partager nos idées et réagir afin de protéger notre sport, notre passion, nos activités et notre futur !

Il faut d’ailleurs savoir qu’une lettre circule au sein du Comité Olympique afin de retirer les sports équestres aux JO. Que serait un sport sans un tel objectif qui motive tous sportifs, sans visibilité, sans sponsors… Le bien-être animal a beaucoup évolué et il va dans le bon sens dans notre sport. Nous devons le mettre plus en avant ! Il ne faut surtout pas oublier la vie terrible des chevaux dans le passé, ces pauvres équidés faisaient la guerre, travaillaient durement la terre pour nourrir l’humain, restaient dans l’obscurité au fond des mines et pendant si longtemps qu’ils en devenaient aveugles, l’homme se nourrissait avec et en grande quantité… Aujourd’hui, on les chouchoute de plus en plus. Leurs conditions de vie ont beaucoup évolué. Ils vont au paddock, à la longe automatique, ont des fenêtres pour voir à l’extérieur, les boxes sont plus grands, plus lumineux et parfois avec terrasses ou accès direct à des paddocks, on les sort plusieurs fois par jour, ils sont suivis par des vétérinaires, des ostéopathes, des dentistes, on les emmène à la thalasso, à la plage, la qualité des sols des carrières a évolué, les fiches de sécurité aux obstacles ont évité bien des accidents …

Peut-être est-on allé trop loin sur certains points (j’étais heureux de lire dernièrement le sélectionneur français Thierry Pomel dire que peut être à Barcelone et aujourd’hui en général, le sport est devenu trop difficile, je le martèle depuis déjà longtemps). Il faut cependant laisser du temps au temps et rester positif. L’évolution des animaux et des humains a toujours été liée et elle a demandé du temps et de la réflexion. Pour ma part je reste donc positif et je suis certain que, ensemble, nous pouvons aller de l’avant en trouvant l’équilibre et en faisant preuve d’empathie, d’engagement, d’implication et d’attention. Ensemble, nous devons fédérer autour d’une même vision, d’un même discours, d’un même projet. Tous les acteurs, en bas ou au plus haut de l’échelle doivent « faire entendre leur voix », leurs idées et toutes les fédérations nationales mais aussi celle internationale doivent divulguer le bon message, la bonne image en sachant opérer, réformer et rénover notre sport.

Essayons donc dans une période charnière comme celle que connaît la filière en ce moment, d’évoluer ensemble et d’apporter les solutions pour sécuriser notre avenir , plutôt que donner des leçons creuses ou opter pour l’immobilisme et les intérêts privés.

Sportivement votre, Éric

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