Comme nous l’avons vu dans mon dernier article, j’aime organiser des cours théoriques avant de demander à mes élèves de se mettre en selle. Nous avons vu dans ce précédent article les premières questions que je pose à mes auditeurs. Puis arrive une demande qui génère beaucoup de confusion, prouve un manque de savoir, de curiosité ou de passion des élèves… Qu’est ce que mettre son cheval entre mains et jambes ou qu’appelle-t-on la mise en main ? Mes auditeurs me répondent alors souvent : « c’est arrondir l’encolure, ou encore ramener la bouche à soit et raccourcir l’encolure… » Leur ignorance ou confusion vient malheureusement d’un grand nombre d’instructeurs qui utilisent des termes différents. Ils parlent souvent de placer ou de fermer son cheval. Pour ma part je préfère la mise en main qui correspond à mettre son cheval entre mains et jambes. Les autres expressions peuvent avoir à mon avis un sens péjoratif ou porter à l’erreur. Mon rôle est donc d’expliquer qu’est-ce-que la mise en main, son utilité et comment procéder pour l’obtenir.
Comme je vous l’ai déjà dit, je n’aime pas les grands discours et les définitions complexes. J’explique donc pourquoi et comment mettre son cheval sur la main simplement ainsi :
1- Les points forts de cette attitude entre mains et jambes : le cheval n’ayant pas de clavicule, elle lui permet de consolider sa structure osseuse et musculaire pour ainsi mieux porter son cavalier. Elle octroie une meilleure poussée des postérieurs, l’abaissement des hanches, la montée du dos et du garrot, une bonne mise en main où le cheval va vers le mors et tombe dans la main. On obtient de la tension de toute la ligne du dessus du cheval comme un élastique tendu et allongé.
2- A quoi ressemble mon cheval quand il est dans cette attitude : La principale image classique représentative d’un cheval mis en main est de celui qui maintient les hanches abaissées, un dos rond, un garrot remonté, la nuque haute et point culminant de son corps, l’angle ganaches cou fermé a 45%, le front ou chanfrein à la verticale. L’angle postérieurs / antérieurs est plus fermé car les postérieurs se rapprochent des antérieurs; mon cheval semble plus comprimé, raccourci, compacté, rond, comme un ressort que je resserre… Imaginez votre cheval comme une balle. Dans cette attitude il obtient du rebond, des allures plus verticales et moins horizontales, preuve d’équilibre et d’impulsion associés.
3- Comment obtenir la mise en main : je ralentis le pas de mon cheval en tendant mes rênes et fermant mes doigts sur les rênes pour pouvoir rapprocher et activer mes jambes. Je crée ainsi de l’activité des postérieurs, de l’impulsion jusqu’à pousser mon cheval vers le mors et le sentir rester en appui sur ce dernier. Mes jambes seront proportionnelles à mes mains. Plus je tends mes rênes, plus je renforce l’action de mes jambes. Par ce procédé le cheval va dans un premier temps venir plus en dessous sa masse avec les postérieurs. Il va ensuite abaisser les hanches, puis remonter son dos et son garrot. Grâce à cela, il va arrondir plus facilement toute sa ligne du dessus (dos) et son encolure pour tomber ensuite facilement dans ma main. Je reçois ainsi sa bouche plutôt que de lui prendre. C’est l’arrière-main qui se rapproche de l’avant-main du cheval et non le contraire !
4- Recommandations : obtenir une telle attitude peut-être très contraignant pour le cheval et c’est pourquoi il faut une progression lente et précise. Évitez de travailler trop longuement votre partenaire dans cette attitude. 45 minutes ou 1 heure avec des pauses ou du travail en extension entre, sont recommandées. Chaque cheval demande une mise en main différente en fonction de son physique, de son âge, de son degré de dressage, de sa bouche… L’angle au niveau des ganaches peut être plus ou moins ouvert ou fermé ; le chanfrein à la verticale ou plus ou moins en avant ou en arrière de celle-ci (sans aller vers le Rollkur qui endommage le cheval) ; la nuque peut être plus ou moins haute et non obligatoirement le point culminant du cheval… La bonne posture du cheval tout comme la bonne position du cavalier sont celles qui permettent au cheval de bien fonctionner physiquement et de bien se mouvoir. On parle alors de biomécanique! Souvenez-vous dans tous les cas, que avant de raccourcir les muscles, il faut déjà les étirer. Quitte à laisser au début mon cheval dans une attitude naturelle avec le bout du nez en avant de la verticale pour obtenir de la tension. L’important étant de se concentrer sur l’arrière-main et la bouche, non la tête ou l’encolure. Accepter du poids sur le mors et de la tension sont des passages obligatoires pour avoir un cheval posé sur le mors et pouvoir ensuite travailler sa bouche pour l’améliorer et obtenir plus de légèreté et d’équilibre. Dans cette même recherche, il ne faut pas hésiter à le travailler en extension. Je dis souvent à mes élèves d’imaginer qu’ils doivent créer de l’espace entre les vertèbres. C’est exactement comme pour nous si nous faisons du yoga. On ne va pas me demander par exemple de faire le grand écart du jour au lendemain et m’obliger à le faire en me montant sur les épaules au point de me rompre ! Le corps ayant une mémoire et le cerveau se souvenant en priorité des événements douloureux, je ne suis pas prêt de me représenter d’aussitôt à un cours de yoga. Il faut avant tout permettre aux muscles d’être dans la bonne direction en étant étirés avant de les raccourcir ou de les contracter. Avec le cheval c’est la même chose !
Un cheval mis en main ne veut pas dire pour autant qu’il faut réduire sa foulée. Il peut être dans cette attitude malgré une belle amplitude de foulée. Il est certain qu’au début, il est préférable de le travailler sur des allures lentes pour mieux gérer la vitesse et l’équilibre. Exactement comme pour un enfant à qui on apprend à marcher. Au début on maintient une certaine présence en le tenant par la main, mais sans lui tirer sur le bras pour autant et en revanche en lui conseillant régulièrement d’aller lentement et calmement. Avec les chevaux il faut toujours garder en tête le concept du Général l’Hotte : calme, en avant et droit.
Conclusion : l’Homme intelligent se distingue de l’ignorant car il est intéressé et intéressant. J’espère que mes écrits vont éclairer certains de vous et les inciter à aller vers la belle et juste équitation dans le respect de l’animal. Bon travail à vous et à très bientôt sur mon blog concernant d’autres arguments.
Sportivement votre, Éric